lundi 20 mars 2017

Quelques petits bouts de trucs qui vont devenir un album.

Vous savez tous ce qu'est un album de BD. Couverture souple ou cartonnée. Petit ou grand format. 46, 54, 62 pages ou davantage. Couleurs ou noir et blanc.
Oui, mais ce que vous connaissez n'est que la partie émergée de l'iceberg. Avant cela, il y a la conception, l'écriture, les recherches... Sur ce blog, j'essaie de vous faire partager cette partie méconnue de la construction d'un album.
Le tome 13 de Lady S dont j'assurerai à la fois le scénario et le dessin n'est encore qu'à l'état d'ébauche. Voici quelques instantanés du travail qui se situe en amont de la phase graphique, c'est-à dire avant même la réalisation des premiers crayonnés. Des crayonnés, j'en ai déjà montré ici des dizaines, et cela me semble amusant de remonter encore un peu le courant de la création pour vous permettre  d'apercevoir quelques éléments de ce qui précède.
Ce sont des bouts de trucs, ça ne ressemble à rien de concret, mais c'est ainsi que commence le travail, à partir d'éléments flous et morcelés dont l'assemblage compose la charpente d'un album.

La première chose, indispensable pour réaliser un album, c'est d'avoir une idée. Comment vient-elle ? De lectures, de réminiscences inconscientes, de films qu'on a vus, de l'actualité ? Mystère. En tout cas, quand le miracle s'opère, une idée finit par émerger. Je parle de la bonne idée, évidemment, pas des cinquante qu'on a tous les jours et qu'on oublie illico tellement elles sont ineptes. Je parle de THE idée, de celle qui a en elle le potentiel nécessaire pour devenir un album.
Une fois qu'on est sûr de son idée, on a l'essentiel, le reste n'est que du temps, de la réflexion, du travail.

Ensuite, en fonction du sujet et du contexte, il faut se documenter sur le sujet abordé. Par exemple, dans le tome 13 de Lady S, je voulais mettre la Cour Pénale Internationale au centre de l'histoire. J'ai donc réuni un certain nombre d'éléments pour savoir comment fonctionne exactement cette institution. Ci-dessous,vous pouvez voir quelques articles et notes qui m'ont servis de base de travail pour donner à mon histoire une crédibilité indispensable à tout récit contemporain.





Vient alors l'écriture du scénario. Première étape : la structure. Les scénaristes hollywoodiens utilisent le classique procédé du tableau. Il en existe différentes sortes, simples ou complexes...

Voici le mien pour le tome 13 de Lady S (amusez-vous à zoomer, mais j'ai bien peur que la définition de la photo soit trop faible pour vous permettre de déchiffrer quoi que ce soit).

Chaque post-it correspond à une séquence ou à une idée majeure. Ce tableau me fournit une vision globale de mon histoire. Si vers la fin il me manque un élément, je peux à loisir l'inventer sur un post-it et l'intercaler n'importe où pour le rendre logique dans la continuité.
Par exemple, alors que j'écris la séquence finale, je m'aperçois d'une chose : mon personnage principal a un bras en trop. Pour une raison ou une autre, il ne peut résoudre son problème que s'il n'a qu'un seul bras. Je peux alors revenir en arrière sur mon tableau et inventer une séquence que je situerai en début d'album et dans laquelle le personnage en question perdra un bras, ce qui rendra logique la réussite de la séquence finale.
Oui, bon, c'est un exemple, hein ? Lady S ne perd aucun bras dans le tome 13, je vous rassure...

Ensuite, la réalisation du script, découpage case par case et dialogué de l'album, est une formalité. Formalité qui prend quand même un mois et demi environ. Ci dessous, vous pouvez voir un aperçu de mon script, qui évolue encore au moment crucial de l'étape du storyboard.



Une fois le scénario terminé, le dessinateur reprend ses droits et file sur les lieux où doit se dérouler l'album, pour effectuer les indispensables repérages photo.



Le tome 13 se passe entièrement à Paris, des deux côtés du pont Mirabeau. Un peu dans le quinzième, un peu dans le seizième arrondissement. Et un peu entre les deux sur l'île aux cygnes, où se trouve la réplique réduite de la statue de la liberté.

Ensuite, le storyboard est réalisé, sur la base du script et de ces documents photo.


Et après, me direz-vous ? Oh, pas grand chose... 7 à 8 mois de travail sur les planches, crayonnés, encrage, couleurs, retouches diverses... Un détail.